Mahmoud Abbas a été très clair, samedi 1er février, devant ses pairs de la Ligue arabe, réunis en urgence au Caire (Égypte). Le président de l’Autorité palestinienne a assuré qu’il n’y aurait plus désormais « aucune sorte de relation avec les Israéliens ainsi qu’avec les États-Unis, y compris en matière sécuritaire ». Du moins tant que restera d’actualité le « plan de paix » de Donald Trump, qui prévoit l’annexion de toutes les colonies juives et de la vallée du Jourdain, en Cisjordanie occupée.
Ce n’est pas la première fois qu’Abbas menace ; il n’est jamais allé jusqu’au bout. Les services de sécurité de l’Autorité palestinienne, déployés dans les grandes villes de Cisjordanie depuis les accords d’Oslo (1993), continuent de travailler main dans la main avec leurs homologues israéliens. Pas une semaine ne passe sans que l’armée israélienne ne mène des « opérations antiterroristes ». À chaque fois, les responsables palestiniens sont informés et retirent leurs policiers de la zone pour éviter toute confrontation.
« Trahison »
Autre exemple ? Les déplacements de Mahmoud Abbas, notamment pour l’étranger, via la Jordanie, sont étroitement coordonnés avec les Israéliens pour éviter que le convoi d’une dizaine de véhicules, bourrés d’hommes armés, ne soit bloqué par un barrage ou une patrouille.
Cette coopération sécuritaire va bien plus loin, à travers des échanges de renseignements sur les activistes palestiniens, en particulier les militants du Hamas. Au pouvoir dans la bande de Gaza, le mouvement islamiste est largement contenu en Cisjordanie. Là encore, la redoutable Sécurité préventive d’Abbas veille au grain, en lien avec les services spécialisés israéliens (Shin Beth, Aman…) face à « l’ennemi commun ».
Au risque de saper son propre pouvoir, le président de l’Autorité palestinienne n’a donc aucun intérêt à rompre totalement. Mais en se fâchant tout rouge, il rappelle qu’Israël a beaucoup à perdre en allant trop loin. Annexer une grande partie de la Cisjordanie, c’est retirer à Mahmoud Abbas toute justification à cette « collaboration sécuritaire » face à une majorité de Palestiniens qui la rejettent et l’assimilent à « une trahison ».
« Cauchemar pour Israël »
Et en cas d’effondrement de l’Autorité palestinienne, provoqué par une annexion unilatérale de pans entiers de la Cisjordanie, Israël se retrouverait en première ligne pour assurer l’ordre, y compris dans les villes palestiniennes surpeuplées. La quasi-totalité des responsables militaires israéliens mettent en garde leur gouvernement contre un tel scénario, qui pourrait dégénérer en troisième Intifada. « L’annexion est dangereuse et pourrait se transformer en cauchemar pour Israël », a prévenu Amos Yadlin, ex-patron de l’Aman, les Renseignements militaires, dans le quotidien Haaretz.